Les collections russes
Les explorations russes en Asie centrale chinoise
L’expansion russe au Turkestan (Tachkent, Samarcande et au-delà) dans les années 1860 stimule l’intérêt porté par la Russie et la communauté internationale à l’Asie centrale, et donne à la Russie et à ses alliés un point d’accès utile à une région dont l’importance géopolitique va croissant. Le gouvernement russe a déjà la réputation de soutenir les recherches scientifiques et d’être disposé à partager leurs résultats avec les savants du monde entier par l’intermédiaire de la Société géographique russe, fondée en 1845 par des scientifiques et des explorateurs qui ont déjà lancé des expéditions de l’Arctique vers l’Asie. À partir des années 1860, la Société géographique russe commence à organiser des expéditions en Asie centrale, pour cartographier la région, faciliter les échanges, obtenir des informations stratégiques, se tailler une influence politique tout en améliorant les connaissances dans les domaines de la botanique, de la zoologie, de l’entomologie, de la géographie, de l’ethnographie et de l’archéologie. La Société géographique russe collabore avec d’autres institutions russes et des particuliers pour obtenir des financements et établir des comptes rendus ; les expéditions russes sont très nombreuses à sillonner la région de 1870 à 1920.
Dans les années 1860 et 1870, les expéditions menées entre autres par Przhevalski (voir ci-dessous) et Ioann-Albert Regel privilégient la cartographie, la botanique et la zoologie, et commencent à rendre compte de trouvailles archéologiques. Regel décrit des temples en ruines et des vestiges bouddhistes dans la région de Turfan en 1878. Gregor Nikolaevich Potanine, qui dirige quatre expéditions dans la région entre 1876 et 1892, explore des dizaines de milliers de kilomètres, collecte des spécimens de plantes, d’oiseaux et de mammifères, et décrit également des ruines dans les sables du désert. D’autres explorateurs parmi lesquels Berezovski et Koslov (voir ci-dessous) participent à des expéditions botaniques menées entre autres par Potanine et Przhevalski, et effectuent ensuite des recherches archéologiques. Les fouilles archéologiques de Berezovski dans la région de Turfan sont poursuivies par Oldenburg (voir ci-dessous).
Soldat, géographie et naturaliste amateur, Nikolai Mikhailovich Przhevalski (1839-88) dirige quatre grandes expéditions entre 1870 et 1885, traverse à plusieurs reprises le désert de Gobi pour rejoindre le Tibet, et traverse le Taklamakan du nord au sud. Il visite également Dunhuang et les grottes de Mogao, et rapporte avoir découvert des ruines enfouies dans le sable à Lop Nor. Przhevalski meurt en 1888 dans les contreforts du Tian Shan au début de sa cinquième expédition, qui se poursuit après sa disparition. On lui doit une cartographie étendue et le transfert de centaines de spécimens botaniques et zoologiques à Saint-Pétersbourg, parmi lesquels un grand nombre d’espèces nouvelles. Si Przhevalski est particulièrement célèbre aujourd’hui, c’est pour avoir découvert une population sauvage de chameaux bactriens et une espèce unique de cheval mongol sauvage, qui a reçu son nom. Parmi les ouvrages qu’il a écrits, on citera : Mongolie : le pays Tangut (1875) et De Kulja : à travers le Tian Shan vers Lob-Nor (1879). Son dernier ouvrage, qui propose que la Russie annexe et colonise l’ouest de la Chine, la Mongolie et le Tibet, soulève plus de controverses (voir IDP Newsn° 27).
Les travaux de Przhevalski sont poursuivis par son étudiant, Piotr Kuzmich Kozlov (1863-1935), qui participe aux deux dernières expéditions de Przhevalski et qui sera membre par la suite d’au moins six autres expéditions. La première expédition indépendante de Kozlov (1899-1901) le mène à travers le désert de Gobi aux confins du Yangtsé et du Mékong, voyage pendant lequel il étudie plus de 9 000 km pour le compte de la Société géographique russe. Parmi les trouvailles faites pendant ce voyage et qu’il envoie à Saint-Pétersbourg, on compte des échantillons de textiles bactriens âgés de plus de 2 000 ans.
Pendant son expédition de 1907–09, Kozlov apporte ce qui est peut-être la plus grande contribution russe à l’archéologie de la Route de la soie, lorsqu’il découvre l’antique cité de Kharakhoto, enfouie dans les sables (elle sera plus tard fouillée par Aurel Stein : voir également IDP News n° 2). Elle a été détruite par Gengis Khan en 1227. Kozlov trouve entre autres des centaines de peintures et de statues bouddhistes qu’il photographie et répertorie. Il trouve également des milliers de manuscrits et de xylographes rédigés en tangut, langue inconnue jusqu’alors, qu’il emporte à Saint-Pétersbourg. Les découvertes par Koslov à Kharakhoto sont décrites dans son ouvrage Mongolie, Amdo et la Ville morte de Khara-Khoto (1923). Lors de sa dernière expédition en Mongolie et au Tibet (1923-26), Kozlov découvre plusieurs sépultures royales Xiongnu.
En 1898, dix ans avant la découverte du tangut par Koslov, la Société géographique russe lance une expédition vers la région de Turfan ; elle est dirigée par Dimitri Alexandrovich Klementz (1848-1914), conservateur du musée d’Anthropologie et d’Ethnographie (Kunstkamera) à Saint-Pétersbourg qui apporte le financement. Klementz, accompagné de sa femme, qui est botaniste, est le premier à conduire des fouilles archéologiques sur la partie nord de la Route de la soie. L’expédition fait des découvertes importantes autour de Karakhoja, Astana et Yarkhoto, parmi lesquelles des manuscrits en ouïgour ancien, en chinois et en sanskrit, des fragments de peintures et des objets runiques. Klementz partage ses découvertes avec Grünwedel (cf. collections allemandes) qui décidera ensuite de lancer sa première expédition au Turfan. Ces trouvailles sont également présentées au 12e Congrès international des orientalistes à Rome en 1899, par Vasilii Vasilievich Radlov (1837-1918) et Sergei Fedorovich Oldenburg (voir ci-dessous). Ces découvertes ainsi que celles de Stein (cf. collections britanniques) contribuent à stimuler l’intérêt de la communauté internationale pour l’achat et la recherche d’antiquités d’Asie centrale. En Russie, L’Association internationale des études d’Asie centrale et de l’Est est créée, afin de mener à bien des explorations géographiques, ethnographiques et archéologiques. Le Comité russe d’études d’Asie centrale et de l’Est, sous l’égide du tsar de Russie, est présidé par Radlov et co-présidé par Oldenburg. Son objet est « d’envoyer des expéditions pour étudier les monuments culturels et les anciens peuples asiatiques susceptibles d’éclairer les liens culturels anciens entre de grandes civilisations différentes, et apporter une assistance à toutes les expéditions internationales ». Le Comité, placé sous la tutelle du ministère des Affaires étrangères, a le droit d’envoyer des représentants sur les sites d’exploration, d’organiser des expéditions et de publier des bulletins en russe et en français.
En 1900, Klementz, Oldenburg et Nikolai Ivanovich Veselovski (1848-1918) présentent leur « Note sur l’organisation d’une expédition archéologique dans le bassin de Tarim », dans laquelle ils indiquent que le développement économique et commercial de la région pourrait gravement endommager les vestiges archéologiques qui s’y trouvent.
Sergei Fedorovich Oldenburg (1863-1934) obtient son diplôme d’études indiennes à l’Université de Saint-Pétersbourg en 1885. Il parfait sa formation en France, en Grande-Bretagne et en Allemagne, et devient enseignant à l’Université de Saint-Pétersbourg en 1889. En décembre 1916, juste avant la révolution bolchevique de février 1917, Oldenburg est nommé directeur du musée asiatique de Saint-Pétersbourg ; lorsque le musée sera restructuré pour donner naissance à l’Institut d’Études orientales, il en deviendra le premier directeur (4 avril 1930). Après la révolution de 1917, il est nommé ministre de l’Éducation du gouvernement provisoire. Il exerce diverses fonctions parmi lesquelles celle de Secrétaire permanent de l’Académie des Sciences de l’URSS (1904-29) et éditeur de la collection Bibliotheca Buddhic (1897-1934). Les recherches d’Oldenburg englobent l’histoire culturelle et religieuse de l’Inde médiévale, l’histoire de l’art bouddhiste, les textes littéraires, les traditions populaires et l’art d’Asie centrale. Il s’intéresse plus particulièrement à Serindia, vaste région d’Asie centrale et orientale qui comprend le Tibet, la Mongolie et le nord-ouest de la Chine. L’étude intégrée des cultures sérindiennes est au cœur des deux expéditions archéologiques d’Oldenburg (1909-1910 et 1914-1915), connues comme les « Expéditions russes au Turkestan ».
La première expédition russe au Turkestan d’Oldenburg (1909-10) est organisée par le Comité russe d’études d’Asie centrale et de l’Est, à une époque où les trouvailles des expéditions britanniques, françaises et allemandes dans la région ne sont pas encore publiées, exception faite d’une petite partie des découvertes faites par Grünwedel lors de ses expéditions (cf. collections allemandes), et du compte rendu de l’expédition de Stein (cf. collections britanniques). Oldenburg consulte Grünwedel et Pelliot (cf. collections françaises) pour obtenir des informations sur leurs recherches récentes avant de planifier son itinéraire et de définir ses objectifs. L’expédition quitte Saint-Pétersbourg le 5 juin 1909 ; Oldenburg en est le directeur, et est accompagné de Samuil Martynovitch Dudin, artiste photographe (1863-1929) (voir ci-dessous et l’article de Menshikov dans IDP Newsn° 14), de l’ingénieur des mines Dmitri Arsenievich Smirnov et des archéologues Vladimir Ivanovich Kamenski et Samson Petrovich Petrenko. Malheureusement, les deux archéologues, terrassés par la maladie, doivent quitter Urumqi pour reprendre le chemin de la Russie. Partant de Saint-Pétersbourg, l’équipe voyage en train jusqu’à Omsk puis poursuit son périple en bateau à vapeur jusqu’à Semipalatinsk, où elle récupère son équipement acheminé depuis Saint-Pétersbourg. Équipés de pied en cap et équipés par un cuisinier, un valet et deux cosaques, les membres de l’expédition partent pour Chuguchak en tarantasses (voitures attelées à chevaux). Arrivés à Chuguchak le 22 juin, ils engagent un interprète originaire de Hami, Bosuk Temirovich Khokho, et poursuivent vers Urumqi et Karashahr avec leur valet Bisambai, le cuisinier Zakari et les deux cosaques Romanov et Silantiev.
Le 22 août, l’expédition entame des fouilles à Shikchin, près de Karashahr, et explore les ruines d’une cité monastique. Dans la région de Turfan, les explorateurs poursuivent leurs travaux à Yarkhoto, Karakhoja, Taizan, Kurutka, Tallikbulak, Sassikbulak, Sengim-agiz, Bezeklik, Murtuk, Chikkankul, Toyukmazar, Sirkip et dans les gorges de Lamjin. Le 19 décembre, Oldenburg parvient à Kucha où il explore plusieurs sites, dont des grottes temples dans les alentours de Ming-teng-ata, Subashi, Simsim, Kirish, Kizil, Kumtura, Torgalyk-akyp et Koneshahr. La méthode d’Oldenburg consiste à prendre des clichés photographiques clairs et précis et à rassembler un grand nombre de données pour obtenir des résultats archéologiques.
En 1910, les découvertes de l’expédition sont présentées au musée d’Anthropologie et d’Ethnologie à l’Académie russe des Sciences de Saint-Pétersbourg, où elles sont cataloguées succinctement. En 1931-1932, elles sont transférées au musée de l’Ermitage qui expose une partie de la collection depuis 1935. La collection comprend des peintures murales, des peintures, des terres cuites, une centaine de manuscrits (pour l’essentiel des fragments en brahmi), des photographies et des cartes faites à main levée de sites, entre autres archéologiques.
Le bref compte rendu de l’expédition d’Oldenburg est publié en 1914 (Ольденбург С.Ф. Русская Туркестанская экспедиция 1909–10 г.. Краткий предварительный отчет. C 53 таблицами, 1 планом вне текста и 73 рисунками и планами в тексте по фотографиям и рисункам художника С.М. Дудина и планам инженера Д.А. Смирнова. СПб., 1914).
La deuxième expédition d'Oldenburg au Turkestan (1914–15) compte parmi ses membres l’artiste V.S. Bikenberg, le topographe N.A. Smirnov, l’ethnologue B.F. Romberg, dix assistants, un interprète chinois et Dudin, le photographe de la première expédition. Celle-ci a pour objectif de dresser une carte des grottes de Mogao à Dunhuang, comportant l’ensemble des niveaux et des sections transversales et longitudinales, de prendre des photographies, de réaliser des copies des principaux objets, et de décrire en détail les grottes. L’expédition quitte Saint-Pétersbourg le 20 mai 1914 et suit l’itinéraire Chuguchak-Gucheng-Urumqi-Anxi-Hami-Qianfodong – le dernier arrêt correspond aux « Grottes aux mille Bouddhas » de Mogao, à proximité de Dunhuang. Le 20 août 1914, elle atteint sa destination finale. Après avoir brièvement examiné les grottes, l’expédition décide de ne pas les renuméroter mais de reprendre la numérotation de Pelliot. Seules trois grottes non recensées par Pelliot (elles furent en effet fouillées après sa visite) le sont par Oldenburg : A, B et C. L’exploration méthodique des grottes de Mogao débute le 24 août pour s’achever le 25 novembre 1914. L’équipe d’Oldenburg emploie des lettres et des chiffres pour identifier toutes les statues et peintures, et recense d'une façon détaillée chaque article en prenant des photographies, en dressant des plans, en réalisant des dessins et en prenant des notes. Les explorateurs trouvent de nombreux fragments d’objets et de manuscrits anciens, qui sont tous soigneusement rassemblés par Oldenburg. Il achète également plus de 300 rouleaux aux populations locales. Lors du voyage de retour, après avoir quitté Dunhuang, Oldenburg visite de nouveau de nombreux sites dans les environs de l’oasis de Turfan, qu’il avait explorés lors de sa première expédition.
Le 1er septembre 1915, les fragments et autres trouvailles, souvent froissés ou collés les uns aux autres, comportant parfois du lœss ou de l’argile, sont rassemblés en paquets et en sacs et remis au musée asiatique de Saint-Pétersbourg (ci-dessus). Celui-ci est devenu la branche à Saint-Pétersbourg de l’Institut d’Études orientales, rattaché à l’Académie russe des Sciences. La collection de manuscrits et de fragments de Dunhuang allant du Ve au XIe siècle rassemblée par Oldenburg se trouve toujours à l’Institut d’Études orientales de Saint-Pétersbourg. Elle contient environ 18 000 objets, parmi lesquels de minuscules fragments. Un grand nombre de fragments de Mogao ont les bords brûlés suite à des débuts d’incendies dans les grottes de Dunhuang, où les gens qui s’y sont abrités au fil des siècles ont fait du feu. Les notes, dessins et photographies de l’expédition sont la seule description qui existe des grottes jusqu’en 1957, date à laquelle Xie Zhiliu publie son catalogue (Dunhuang yishu xulu [Catalogue of art at Dunhuang], Shanghai chubanshe, Shanghai, 1955).
D’autres expéditions russes sont conduites par K.G.E. Mannerheim (cf. collections finlandaises) et Sergei Efimovich Malov (1880–1957), qui effectue deux voyages (1909-1911 et 1913-1914) pour étudier la langue et la culture des Ouïgours, des Lobnoriens et des Salars. Malov sera par la suite le premier à décrire ces populations turciques.
Des diplomates participent aussi activement à la collecte des objets archéologiques et culturels. Leur chef de file est Nikolai Fyodorovich Petrovski (1837-1908), consul général de Russie à Kashgar à partir de 1882 ; il exercera cette fonction pendant vingt-deux ans. Petrovski est un personnage qui a de l’influence dans la région, et qui accueille des expéditions comme celle de Sven Hedin (cf. collections suédoises) et d’Aurel Stein (collections britanniques) et les aide à organiser leurs voyages. Il rassemble une collection importante de manuscrits et d’objets d’art qu’il achète auprès des populations locales, et entreprend également des fouilles archéologiques. Il s’intéresse plus particulièrement à la région de Kashgar à Kucha et Khotan, et au triangle formé par Kashgar, Khotan et Leh au sud. Comme son homologue britannique George Macartney (cf. collections britanniques), Petrovski achète des manuscrits et des livres imprimés dans une langue inconnue : on découvrira plus tard que ce sont des faux.
Le paragraphe suivant, qui traite des collections de l’Institut d’Études orientales, donne plus de détails sur les collections constituées par les représentants de la Russie en Asie centrale.
Les collections : contenu et accès
1. Les collections de l’Institut d’Études orientales de Saint-Pétersbourg
L’Institut d’Études orientales, qui fait partie de la branche de Saint-Pétersbourg de l’Académie russe des Sciences, possède un grand nombre de manuscrits d’Asie centrale dans des langues diverses parmi lesquelles le chinois, le sanskrit, le tibétain, le mongolien, le tangut, le tokharien, l’ouïgour, le khotanais et le saka. La collection de Petrovski contient pour l’essentiel des manuscrits en saka et en sanskrit (brahmi), ainsi que divers documents en tokharien. La collection de N.N. Krotkov, consul de Russie à Urumqi et Kuldja, contient pour l’essentiel des textes ouïgours et quelques fragments de livres anciens gravés sur bois datant du IXe au XIVe siècle. La collection de Berezovski, qui comporte 136 articles, se caractérise par des informations précises sur l’origine de chaque objet. En outre, l’Institut d’Études orientales possède les collections rassemblées par I.P. Lavrov, secrétaire du consulat de Russie à Kashgar au début du vingtième siècle, A.I. Kokhanovski, médecin du consulat de Russie à Urumqi, F.F. Dyakov, consul à Kuldja, et Malov. Les archives des orientalistes à l’Institut d’Études orientales contiennent des documents à caractère personnel ainsi que des cartes d’expéditions russes en Asie centrale, dont celles de Klementz, Malov et Oldenburg.
1.1 La collection de documents en langue tangut de l’Institut d’Études orientales de Saint-Pétersbourg
L’Institut d’Études orientales possède une collection unique en langue tangut, rapportée de Kharakhoto par l’expédition de Kozlov. À l’origine, les découvertes de ce dernier étaient stockées au musée du tsar Alexandre III (dit musée russe), avant d’être transférées au musée asiatique (aujourd’hui Institut d’Études orientales) en 1911. Cette collection comprend pour l’essentiel des manuscrits et des ouvrages imprimés anciens dans la langue morte du peuple Tangut, qui fonda au Xe siècle l’État de Xixia, dans la région qui correspond aujourd’hui au nord-ouest de la Chine. La collection comprend également un grand nombre de manuscrits chinois. Aleksei Ivanovich Ivanov (1878–1937), Paul Pelliot (qui visite la Russie en 1910) et Vasilii Mikhailovich Alekseev (1881–1951) commencent à inventorier ces manuscrits. Leur travail est poursuivi par Nikolai Alexandrovich Nevski (1892–1937) et Konstantin Konstantinovich Flug (1893–1942). Une description complète des pièces chinoises de la collection a été publiée par Lev Nikolaevich Menshikov (1926–2005) (Меньшиков Л.Н. Описание китайской части коллекции из Хара-Хото. (Фонд П.К. Козлова). Прил. сост. Л.И. Чугуевский. М., 1984). Selon Menshikov, la collection de documents en langue tangut de l’Institut d’Études orientales comprend environ 660 manuscrits et livres imprimés chinois, dont la plupart sont des textes bouddhiques. La collection contient également des études historiques, des classiques confucéens, des ouvrages taoïstes, des dictionnaires, des belles-lettres, des gravures et des estampes. Le professeur Evgenii Ivanovich Kytchanov, qui poursuit ces recherches sur les documents tangut, a publié plusieurs catalogues et traductions au cours des dernières décennies. Le professeur Ksenia Kepping (disparu en 2002) a également travaillé sur ces documents et a publié plusieurs articles.
1.2 La collection de Dunhuang de l’Institut d’Études orientales
Les collections d’Oldenburg sont réparties entre l’Institut d’Études orientales et le musée de l’Ermitage (voir ci-dessous), avec les manuscrits de sa deuxième expédition, qui forment le plus gros de la collection de Dunhuang de l’Institut d’Études orientales. Cette collection comporte également une trentaine de manuscrits en khotanese de l’expédition de Malov (1909-10) et 183 manuscrits rassemblés par Krotkov. La collection de Dunhuang de l’Institut d’Études orientales comprend en tout 18 000 pièces, dont 365 rouleaux ainsi qu’un grand nombre de fragments et de petits manuscrits. La majorité de ces manuscrits sont des textes bouddhiques ; seuls 900 sont des textes profanes.
L’étude de la collection commence à la fin des années 1920, avec les travaux du chercheur japonais Kano Naoki. Pendant les années 1930, Flug entreprend de cataloguer et de décrire les documents de Dunhuang ; il publie plusieurs articles sur les principaux manuscrits bouddhiques et non bouddhiques. Dans les années 1950, ces travaux sont poursuivis par un petit groupe de quatre chercheurs: V.S. Kolokolov (1896-1979), Menshikov, V.S. Spirin et S.A. Shkolyar. En 1957, date à laquelle Menshikov est nommé directeur du groupe Dunhuang, 3 640 objets seulement de la collection ont été répertoriés (2 000 par Flug et 1 640 par M.P. Volkova). Le reste de la collection reste stocké comme il est arrivé, dans cinq paquets, une caisse et un sac. Il faut alors éliminer le lœss et les autres débris et effectuer les opérations de conservation et de catalogage avant de pouvoir décrire et étudier la collection. M.I. Vorobyova-Desyatovskaya, I.S. Gurevich, I.T. Zograf, A.S. Martynov et B.L. Smirnov rejoignent par la suite le groupe de recherche. Leurs efforts combinés aboutissent au catalogue Description des manuscrits chinois de la collection de Dunhuang à l’Institut des peuples d’Asie, publié en 2 volumes en 1963 et 1967. Le catalogue comporte 2 954 entrées descriptives, organisées en sections thématiques. En 1999, l’éditeur Shanghai Classics Publishing House publie ce catalogue en chinois, et publie, en 1994-2000, 17 volumes de fac-similés des manuscrits chinois de Dunhuang de la collection de l’Institut d’Études orientales. De 1960 aux années 1980, le catalogage et la description de la collection sont poursuivis par Menshikov, Irena Kwong Lai You et L.I. Chuguevski (1926-2000).
1.3 L’accès à l’Institut d’Études orientales de Saint-Pétersbourg
L’accès à l’Institut d’Études orientales est subordonné à la production d’une lettre de recommandation de l’université, du musée ou toute autre institution à laquelle vous appartenez.
Les heures d’ouverture de la salle de lecture du palais Novo-Mikhailoski (Dvortsovaya naberezhnaya, n° 18) sont 10 h – 18 h, du lundi au vendredi ; elle est fermée le samedi et le dimanche.
Une sélection d’objets des collections est exposée. Il est nécessaire d’obtenir à l’avance une autorisation pour les voir.
La section des manuscrits et documents orientaux de l’Institut d’Études orientales dispose d’inventaires complets et d’un catalogue sur fiches des collections de Dunhuang, ainsi que deux volumes qui décrivent la collection, 17 volumes de fac-similés des documents de Dunhuang qui se trouvent en Russie et des microfilms de la majeure partie de la collection. Pour protéger les originaux, les chercheurs sont invités à consulter d’abord les fac-similés, les microfilms ou les images numériques. Les manuscrits originaux ne peuvent être consultés que de façon exceptionnelle, sur demande spéciale. Lorsque les manuscrits sont fragiles, l’autorisation de les consulter peut être refusée.
Pour de plus amples informations, voir le site internet des collections de l’Institut d’Études orientales.
2. Les collections du Musée de l’Ermitage à Saint-Pétersbourg
Le Musée de l’Ermitage possède également des objets rassemblés lors des nombreuses expéditions menées en Asie centrale à la fin du XIXe et au début du XXe siècles, en provenance de Dunhuang, Bezeklik, Kucha, Shikshin, Toyukmazar, Kumtura, Sassikbulak, Khotan, Kharakhoto, etc.
2.1 La collection Oldenburg du Musée de l’Ermitage
Le musée de l’Ermitage possède des objets et des trouvailles archéologiques des deux expéditions d’Oldenburg, dont des bannières bouddhiques et des hauts de bannières (66 objets), des fragments de peintures bouddhiques sur soie (137 objets) et sur papier (43 objets), des peintures murales (24 objets), des textiles (38 objets), et 8 fragments de manuscrits. En 1910, des peintures murales, des textiles et des peintures provenant de la première expédition d’Oldenburg sont présentés au musée d’Anthropologie et d’Ethnologie (Kunstkamera) de l’Académie russe des Sciences ; en 1931-1932, ils sont transférés au musée de l’Ermitage, où une partie de la collection est exposée depuis 1935. En outre, depuis la fin des années 1950, 71 objets de l’Institut d’Études orientales de Saint-Pétersbourg (voir ci-dessus) sont prêtés au musée de l’Ermitage. L’intégralité de la collection a été restaurée, avant d’être cataloguée et étudiée par N.V. Dyakonova, M.L. Rudova-Pchelina et Menshikov. Une exposition permanente présente une sélection d’objets.
La majeure partie des riches archives des expéditions d’Oldenburg, y compris ses journaux, des cartes, des documents et 2 000 photographies, se trouve au musée de l’Ermitage, une partie étant encore abritée par l’Institut d’Études orientales. Après la disparition d’Oldenburg, sa femme, E.G. Oldenburg, organise et dactylographie tous ses papiers, y compris ses notes prises sur le terrain, qui étaient très difficiles à déchiffrer. Les archives dactylographiées d’Oldenburg comprennent six carnets totalisant 834 pages. E.G. Oldenburg passe également en revue l’ensemble des plaques photographiques de l’expédition russe au Turkestan dans la collection du musée de l’Ermitage, et les identifie en les comparant aux descriptions des grottes faites par écrit par Oldenburg, et en ajoutant les références photographiques à la fin de chaque carnet. Les objets et documents de la première expédition d’Oldenburg au Turkestan ont été publiés en six volumes par la maison d’édition Shanghai Classical Publishing House.
2.2 L’accès aux collections d’Asie centrale du musée de l’Ermitage
Le musée de l’Ermitage, qui se trouve au n° 34 Dvortsovaya naberezhnaya, est ouvert aux visiteurs de 10 h à 18 h tous les jours sauf le mardi.
La galerie d’Asie centrale expose en permanence une sélection de peintures murales, de statues et de peintures bouddhiques sur soie et sur papier des collections de Klementz, Berezovski et Oldenburg. Ces objets sont entre autres des statues bouddhistes et funéraires, des récipients, des peintures murales et des peintures de Turfan, Sassikbulak, Toyukmazar, Shikcin, Kumtura et Khotan. Des objets, des photos, des dessins et des cartes de Dunhuang sont également exposés dans une autre salle. La majeure partie de la collection d’Asie centrale est stockée au Musée de l’Ermitage.
Pour plus d’informations, vous pouvez consulter le site internet du musée de l’Ermitage.
2. Les collections des archives de la Société russe de géographie à Saint-Pétersbourg
Les archives de la Société russe de géographie sont les plus anciennes de Russie ; elles ont été créées en 1845, et sont une source unique pour les chercheurs. Elles contiennent plus de 60 000 dossiers, dont 13 000 comportent des documents ethnographiques, qui ont trait pour certains à l’Asie centrale. Ces documents sont des notes de voyage, des diagrammes, des photographies, des cartes et des objets ethnographiques des expéditions de Przhevalski, Potanine, Koslov parmi d’autres.
Pour de plus amples informations, vous pouvez consulter le site Internet des archives de la Société russe de géographie (en russe uniquement).
Les collections sur IDP
La collection de Dunhuang de l’Institut d’Études orientales à Saint-Pétersbourg est en cours de numérisation dans le cadre du projet IDP. Ce travail, entamé le 1er janvier 2004, est disponible en ligne, ainsi que les rouleaux bouddhistes (sous la cote F-n). La numérisation des fragments de Dunhuang est en cours, et le travail sur les documents en langue tangut a démarré en 2008. Vous trouverez ci-après un récapitulatif de la répartition des documents numérisés par langue.